12 mars 2024

Dieselgate : Les entités publiques lésées ont-elles une obligation légale d’agir en justice en vue de recouvrer une indemnisation ?

Dieselgate : Les entités publiques lésées ont-elles une obligation légale d’agir en justice en vue de recouvrer une indemnisation ?

Dieselgate : Les entités publiques lésées ont-elles une obligation légale d’agir en justice en vue de recouvrer une indemnisation ?

Qu’il s’agisse d’administrations étatiques, de collectivités territoriales, ou encore d’entreprises publiques, elles ont tout autant été victimes du Dieselgate que les entreprises privées. En effet, elles aussi disposent de très larges flottes de véhicules concernés par le scandale. Reste que si les personnes publiques possèdent un intérêt évident à demander réparation de leur préjudice , aussi bien financier que réputationnel, tant en termes de protection de la santé humaine que de l’environnement, l’on pourrait s’interroger à juste titre si elles n’auraient pas une obligation de le faire. En effet, faute d’agir, nous sommes d’avis qu’elles enfreignent les principes d’interdiction d’octroi de libéralités, ainsi que de bonne administration et de bonne gestion des deniers publics. Par ailleurs, lorsque les entités publiques manquent de recouvrer l’indemnisation à laquelle elles ont le droit, se pose alors la question de savoir si, au regard du droit européen des aides d’Etat, il ne faudrait pas considérer qu’elles accordent une aide d’Etat illégale et/ou incompatible avec le marché intérieur.

Qu’il s’agisse d’administrations étatiques, de collectivités territoriales, ou encore d’entreprises publiques, elles ont tout autant été victimes du Dieselgate que les entreprises privées. En effet, elles aussi disposent de très larges flottes de véhicules concernés par le scandale. Reste que si les personnes publiques possèdent un intérêt évident à demander réparation de leur préjudice , aussi bien financier que réputationnel, tant en termes de protection de la santé humaine que de l’environnement, l’on pourrait s’interroger à juste titre si elles n’auraient pas une obligation de le faire. En effet, faute d’agir, nous sommes d’avis qu’elles enfreignent les principes d’interdiction d’octroi de libéralités, ainsi que de bonne administration et de bonne gestion des deniers publics. Par ailleurs, lorsque les entités publiques manquent de recouvrer l’indemnisation à laquelle elles ont le droit, se pose alors la question de savoir si, au regard du droit européen des aides d’Etat, il ne faudrait pas considérer qu’elles accordent une aide d’Etat illégale et/ou incompatible avec le marché intérieur.

Qu’il s’agisse d’administrations étatiques, de collectivités territoriales, ou encore d’entreprises publiques, elles ont tout autant été victimes du Dieselgate que les entreprises privées. En effet, elles aussi disposent de très larges flottes de véhicules concernés par le scandale. Reste que si les personnes publiques possèdent un intérêt évident à demander réparation de leur préjudice , aussi bien financier que réputationnel, tant en termes de protection de la santé humaine que de l’environnement, l’on pourrait s’interroger à juste titre si elles n’auraient pas une obligation de le faire. En effet, faute d’agir, nous sommes d’avis qu’elles enfreignent les principes d’interdiction d’octroi de libéralités, ainsi que de bonne administration et de bonne gestion des deniers publics. Par ailleurs, lorsque les entités publiques manquent de recouvrer l’indemnisation à laquelle elles ont le droit, se pose alors la question de savoir si, au regard du droit européen des aides d’Etat, il ne faudrait pas considérer qu’elles accordent une aide d’Etat illégale et/ou incompatible avec le marché intérieur.

L’absence de recouvrement d’une indemnisation constituerait une violation du principe de non-octroi de libéralités.

 En vertu du principe de non-octroi de libéralités, les entités publiques ne peuvent pas faire de don ni mettre à disposition des ressources publiques sans aucune contrepartie[1].

En effet, selon l’arrêt du Conseil d’Etat de 1971 Sieurs Mergui[2], il est interdit pour « les personnes morales de droit public [de] payer une somme qu'elles ne doivent pas ». Principe fondamental du droit administratif français, le Conseiller d’Etat Jean Romieu considérait dès 1893 que « c'est, pour employer une expression brutale, dire qu'ils ne peuvent pas faire de libéralités, [que] les deniers de l'Etat ne [peuvent] servir qu'à payer les services faits »[3]. Inspiré de la pensée révolutionnaire, l’idée était d’éviter autant que possible les privilèges octroyés arbitrairement par l’Ancien régime. Aujourd’hui, ce principe de bon sens, « peu discuté dans la doctrine administrativiste, tant il paraît aller de soi que l'administration ne peut faire une utilisation trop généreuse des deniers publics »[4], s’applique à n’importe quel contrat contracté par une entité publique.  

Dans l’affaire du Dieselgate, les entités publiques ont acheté ou loué des véhicules à des prix excessifs compte tenu de l’absence de système de contrôle des émissions de gaz polluants conformes aux normes applicables. Dans ces conditions, la question se pose de savoir si, en ne récupérant pas les surcoûts payés, la personne publique ne consentirait pas aux constructeurs incriminés des libéralités prohibées. Selon nous, dans la mesure où l’absence de recouvrement de sommes, qui seraient pourtant dues, serait équivalente à faire don de ces sommes. La personne publique n’a pas en réalité d’autre choix que d’agir en indemnisation, sauf si les frais de justice associés sont supérieurs au montant de recouvrement escompté.  

Le non-recouvrement d’une indemnisation se heurterait aux principes de bonne administration et de bonne gestion des deniers publics.

 D’une part, le principe de bonne administration impose aux entités publiques de ne pas agir arbitrairement mais de manière rationnelle afin de satisfaire pleinement l’intérêt général[5]. Pierre-Charles Pupion, Professeur à l’Université de Poitiers, estime en ce sens que l’on doit entendre par l’expression de bonne administration « la recherche de la meilleure façon de conduire la politique publique et de gérer l’administration publique »[6]. Sans bénéficier d’une définition actée, ce principe relève du bon sens. Les entités publiques chargées de mission(s) de service public, soit d’activité(s) d’intérêt général, se doivent d’œuvrer en faveur de leur(s) réalisation(s).

Or, une personne publique qui ne perçoit pas une indemnisation qui est lui est due n’œuvre pas dans le sens de l’intérêt général. En particulier, dans le cas de sommes qui seraient dues en raison d’infractions pénales suspectées, l’absence de recouvrement serait contraire à la protection de l’intérêt général, dans la mesure où elle permettrait aux auteurs d’infractions de ne pas avoir à rembourser les sommes illégalement acquises.

 D’autre part, le principe de bonne gestion des deniers publics, qui découle du principe de bonne administration, vise à protéger l’argent public, le gérer d’une manière raisonnable et en faveur des administrés[7]. Tout est question ici de mise en balance, qui devra toujours être à l’équilibre ou en faveur de l’administration. Ainsi, lorsqu’une entité dépense des fonds publics, elle doit obtenir une contrepartie égale ou supérieure, éventuellement. L’on ne tolérerait donc pas, en vertu de ce principe, qu’une personne publique débourse plus que ce qu’elle obtiendrait en contrepartie.  

Partant, ne pas recouvrer des deniers publics serait contraire à ce principe, sauf si le coût du recouvrement dépasse celui du montant d’indemnisation à obtenir. Or, dans les cas où ces coûts de recouvrement sont pris en charge par un tiers, comme dans l’affaire Diesel, la personne publique n’a plus aucun motif valable pour ne pas agir.

Ne pas encaisser l’indemnisation réparant leur préjudice pourrait revenir à accorder une aide d’Etat.

Une aide d’Etat se définit comme l’octroi d’un avantage sélectif, au moyen de ressources publiques, de nature à fausser la concurrence dans l’Union européenne. La question se pose donc de savoir si, en ne recouvrant pas les sommes qui leur sont dues, les personnes publiques ne consentiraient pas un avantage sélectif aux entreprises débitrices de ces sommes, faussant ainsi la concurrence entre elles. Un tel effet néfaste sur la concurrence serait la conséquence même de la sélectivité de l’avantage monétaire consenti puisqu’octroyé aux seuls constructeurs qui auraient vendu des véhicules diesels polluants.

 Il se pourrait qu’une telle aide d’Etat serait non seulement incompatible avec le marché intérieur mais également illégale puisque non notifiée à la Commission européenne.

 A la lumière de ce qui précède, il ne fait pas de doute à nos yeux que les entités publiques ont, non seulement un intérêt, mais également une obligation de recouvrer leur indemnisation.

 Prenant acte de ces éléments, toute entité publique qui souhaiterait réclamer son indemnisation dans l’affaire du Dieselgate, sans avoir à débourser de frais, est invitée à le faire en rejoignant l’action collective que nous menons. Pour plus de renseignements, vous pouvez nous contacter à l’adresse électronique suivante, et ce, sans engagement de votre part : mbarennes@geradinpartners.com.

Par Marc Barennes, Avocat aux barreaux de Paris et de New York et Brunehilde WERNERT, juriste.


[1] Le principe d’interdiction des libéralités par les personnes publiques, Jean-Philippe Ferreira, AJDA 2023, page 2028.

[2] CE, sect., 19 mars 1971, n° 79962, Sieurs Mergui, Lebon 235, disponible sur Légifrance au lien suivant : https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007642380/

[3] J. Romieu, concl. sur CE 17 mars 1893, Compagnie des chemins de fer du Nord, de l'Est et autres c/ Ministre de la guerre, Lebon 245 ; S. 1894. 3. 124

[4] Ibid, Jean-Philippe Ferreira.

[5] La bonne administration, un principe fondateur du droit administratif, Ismail Haddar, Village de la Justice, mis en ligne sur village-justice.com le 25/07/2016, disponible en cliquant sur le lien suivant : https://www.village-justice.com/articles/Bonne-administration-principe-fondateur-droit-administratif,22725.html

[6] NPM ou bonne administration : le rôle de l’éthique, Pierre-Charles Pupion, Gestion et Management public, 2015/4 (volume 4/n°2), page 1 à 3, mis en ligne sur Cairn.info le 11/04/2016, disponible sur https://doi.org/10.3917/gmp.042.0001

[7] Le bon usage des deniers publics, David Boiteux, Revue de Droit public, n°5, RDP 2011-5-001, paru le 01/09/2011, page 1099, disponible sur La Base Lextenso : https://www.labase-lextenso.fr/revue-du-droit-public/RDP2011-5-001#:~:text=Ainsi%2C%20le%20droit%20des%20finances,assur%C3%A9e%20par%20le%20droit%20positif.